Le plurilinguisme chez l'enfant, comment ça marche ?
Le plurilinguisme chez l'enfant
Vis ma vie d'expat

Le plurilinguisme chez l’enfant #podcast63

Dans cet épisode, Coralie nous parle du plurilinguisme de sa famille et partage en particulier l’expérience de sa fille qui a grandi dans un environnement polyglotte. A 8 ans, Cassie parle couramment quatre langues ! Donc c’est tout naturellement que l’on aborde le sujet du plurilinguisme chez l’enfant avec Coralie.

1- Peux-tu te présenter ?

Je m’appelle Coralie, j’ai 35 ans et je suis traductrice. Je vis à Grenade en Andalousie depuis six ans et demi, après avoir vécu à Valence et Rome. C’est d’ailleurs en Italie que j’ai rencontré mon mari, qui est britannique et c’est là aussi qu’est née notre 1ère fille. Notre 2ème fille est née à Grenade.

Comme vous pouvez le voir, il y a déjà une base pour le plurilinguisme dans notre famille !

plurilinguisme chez l'enfant
Crédit photo : Coralie Neuville

2- Qu’est-ce qui vous a amenés en Espagne ?

En 2013, nous avons quitté Rome pour Valence parce qu’en pleine crise économique, nous étions fatigués de l’Italie, tout simplement. Vivre dans une capitale avec un rythme métro, boulot, dodo peut être épuisant… Nous avons choisi Valence parce que c’est une ville agréable que nous connaissions un peu.

Nous avons donc quitté nos deux CDI et sommes partis à l’aventure avec notre fille de 22 mois ! Grâce à nos réseaux, nous avons pu rapidement travailler en donnant des cours et en faisait des traductions. Cela nous a permis de nous installer en freelance et d’être indépendants.

3- Pourquoi ne pas avoir choisi une région plus isolée de l’Italie ?

Nous nous sommes posé la question, et même de rentrer en France ou au Royaume-Uni.

Mais cela a toujours été important pour nous de trouver un terrain neutre : mon mari est britannique, je suis française mais nous parlons Italien entre nous. Nous ne voulons pas que l’un de nous deux soit en position de force.

Il faut savoir qu’en Italie, l’administration est très compliquée. Par exemple, pour les étrangers, c’est très difficile d’acheter une maison ou un appartement donc nous ne souhaitons pas retourner y vivre.

A côté de cela, la culture italienne est très présente dans notre quotidien.

plurilinguisme chez l'enfant
Crédit photo : Coralie Neuville

Vous avez donc dû apprendre une nouvelle langue !!

Oui… nous avions tous les deux appris l’Espagnol à l’école mais l’Italien était passé par là ! Les premiers mois, nous parlions Italien !! A Valence, il y a le Valencien qui est très pratiqué donc à la crèche, notre fille avait une puéricultrice qui ne parlait qu’en Valencien, et une autre qui parlait en Castillan. Donc cela faisait deux nouvelles langues d’un coup !

Le Valencien ressemble fortement au Catalan (même s’il ne faut pas le dire !!!). Mais, comme nous ne sommes restés qu’un an, nous n’avons pas appris le Valencien ; nous avons plutôt misé sur le Castillan !

4- A partir de quel âge le plurilinguisme est-il entré dans ta vie ?

J’ai toujours voulu vivre à l’étranger. Petite, je voulais vivre en Australie. Puis très tôt, j’ai voulu vivre en Italie. J’avais 8-9 ans. C’était vraiment mon projet de vie ! J’ai donc orienté mon parcours dans ce but-là. A 14 ans, je parlais Italien, j’avais des amis là-bas et je voulais leur parler en Italien. Tous les ans, je faisais un voyage en Italie et j’y restais de plus en plus. A 19 ans, finalement, j’ai eu l’opportunité de partir en Erasmus et je n’en suis jamais revenue ! J’ai fait toutes mes études là-bas.

J’ai fait des études de Littérature, Langues et Culture mais je n’aimais pas du tout l’Anglais par exemple. Petit à petit, j’ai quand même dû m’y mettre pour ma belle-famille. Et tous les jours, mon mari parle Anglais à nos filles.

Lui, avait vécu 1 an à Paris donc il avait déjà un bon niveau de Français. Et aujourd’hui, nous parlons tous les deux très bien l’Anglais, le Français, l’Italien et nous avons ajouté l’Espagnol !Le plurilinguisme chez l’enfant est pour nous naturel.

5- Comment cela s’est-il passé quand ta fille a commencé à parler ? Comment avez-vous géré ce plurilinguisme familial ?

Nous avions tous les deux très peur de ne pas réussir à lui parler en Français ou en Anglais ; tout simplement parce que notre quotidien était en Italien. Nous ne parlions l’Anlgais et le Français qu’au travail. Et nous avions très peu d’amis francophones ou anglophones. Mais finalement, cela a été assez naturel après la naissance de lui donner des petits noms en Français pour moi, et en Anglais pour lui. Chacun chantait des comptines dans sa langue maternelle, c’était vraiment naturel.

Nous avions lu pas mal de livres sur le sujet du Le plurilinguisme chez l’enfant. Ce qui était important était de ne pas la confondre : je ne lui ai toujours parlé qu’en Français et mon mari qu’en Anglais. Entre nous, nous avons gardé l’Italien et elle allait à la crèche en Italien. Ses premiers mots ont donc été en Italien mais elle a toujours baigné dans trois langues différentes.

Lorsque nous avons déménagé en Espagne, elle a dû s’adapter elle aussi. C’est à partir de 3 ans que l’enfant commence à comprendre qu’il a des personnes autour de lui, en-dehors de sa famille proche, et qu’il veut imiter les enfants de son âge. Là, nous nous sommes rendu compte qu’elle ne voulait plus parler en Français ou en Anglais, seulement en Espagnol ! Elle voulait faire comme ses petits camarades ! Mais, ce n’était pas une option pour nous donc, nous lui disions « non, non, on ne comprend pas », ce qui l’énervait beaucoup !! Avec le temps, beaucoup de patience et de persévérance, cela a fonctionné ! Mais, cela a été difficile, parce que cette situation a duré des mois, voire 1 à 2 ans.

Finalement, elle a pris le pli de nous parler chacun dans notre langue. Mais il restait le problème de l’Italien… problème que nous avons résolu en prenant une baby-sitter Italienne ! Et c’est là que nous avons commencé à prendre des baby-sitters de toutes les langues !

Ce qui est important pour les enfants, c’est d’avoir une langue par personne. Le fait d’avoir des baby-sitters de langues différentes lui a permis de comprendre qu’elle ne parlerait pas anglais seulement avec Daddy et Français seulement avec Maman.

Vers 5-6 ans, elle a trouvé que c’était super cool de parler plusieurs langues. En allant au Royaume-Uni, elle pouvait parler avec tout le monde ; dans les aéroports, elle pouvait jouer et communiquer avec tous les enfants. Lorsqu’elle a eu ce déclic, le plurilinguisme était devenu une évidence pour elle.

6- Et aujourd’hui ?

Aujourd’hui, elle parle 4 langues qui lui permettent de communiquer avec une très grande partie du monde ! Elle parle toujours Français avec moi et Anglais avec son père. Et vu le contexte sanitaire, nous n’avons plus de baby-sitter Italienne donc nous acceptons qu’elle intervienne en Italien avec nous. Cela lui permet de pratiquer et d’enrichir son vocabulaire. Ce qui passe aussi par la lecture.

plurilinguisme chez l'enfant
Crédit photo : Coralie Neuville

7- D’ailleurs, comment avez-vous procédé pour la lecture ?

Elle était dans une école maternelle où ils ne voulaient pas introduire la lecture avant 6 ans. C’est très rare en Espagne, où les enfants apprennent à lire plus tôt qu’en France, mais cela nous a plutôt arrangés !

Elle voulait lire en Anglais et un peu en Français. Donc, nous avons commencé à introduire la lecture à la maison dans ces deux langues avec la méthode syllabique.

A 6 ans, lorsqu’elle a changé d’école, elle s’est retrouvée avec des enfants qui savaient déjà lire l’Espagnol… alors qu’elle savait seulement décortiquer des sons dans d’autres langues. Pour rassurer la maîtresse qui n’était pas très intéressée par le plurilinguisme, nous nous sommes concentrés sur l’Espagnol en ce qui concerne la lecture. En quelques mois, elle savait lire en Espagnol. Nous avons donc pu réintroduire le Français et l’Anglais ensuite.

C’était plus compliqué avec le Français… mais elle a commencé à y prendre du plaisir lorsqu’elle a été abonnée à J’aime Lire. Elle a eu le déclic et maintenant elle lit parfaitement en Français aussi. Pour l’Italien, cela s’est fait tout seul, c’est une langue très facile à lire.

Cela a été difficile pendant 2 ans mais maintenant, le plurilinguisme est un acquis et elle aime ça ! Elle aime cette petite différence et ce côté Tour de Babel à la maison !

8- Même sans parler de plurilinguisme, je trouve que l’introduction à la lecture n’est pas toujours évidente. Est-ce que tu as des conseils à partager pour motiver les enfants à lire ?

Il n’y a pas de recette miracle… on la laisse choisir les livres qu’elle veut. On l’a emmenée dans des librairies en France et au Royaume-Uni pour qu’elle choisisse. Elle a commencé des collections.

En Anglais, elle a adoré David Walliams ; en Français, les J’aime Lire, les bandes dessinées (Astérix, Tintin, Picsou), Enquête au collège. Par contre, elle déteste les contes de fée.

A la maison, on regarde très peu la télévision et quand elle s’ennuie, on lui dit de prendre un livre. Cela marche bien avec notre aînée, on ne sait pas si ça marchera avec la deuxième !

9- Comment gères-tu l’apprentissage de la grammaire Française ?

Sur base de ce qu’elle apprend en Espagnol à l’école, je lui explique comment cela fonctionne en Français. Et je lui fais écrire des petites choses, une petite carte postale à une copine, des recettes, etc.

En-dehors de l’école, nous la préparons à des examens. Elle a passé l’examen de Cambridge et pour le Français, elle a passé le Prim. Cela la motive à travailler l’écrit et la grammaire.

Nous avons opté pour cette méthode si jamais on déménage et si elle doit intégrer une école internationale, il faut qu’elle soit au niveau.

Mais, aujourd’hui, l’apprentissage « technique » des langues ne nous inquiète plus autant. Les quatre langues sont désormais acquises, on ne pourra plus lui enlever !

roadtrip andalousie avec des enfants grenade

10- Pour les enfants qui n’aiment pas lire, comment peut-on enrichir leur vocabulaire ?

La télévision ! Cela reste un très bon outil ! Avec Netflix ou d’autres plateformes, on peut facilement passer d’une langue à l’autre, c’est très facile. Sur TV5 Monde, il y a aussi beaucoup d’activités, des jeux interactifs.

Parler avec les grands-parents, en visio. Faire des jeux avec eux à distance sur des applications.

Avoir des amis étrangers ! On a quelques amis Français et Britanniques ici qui ont des enfants. Avec eux, elle se retrouve immédiatement immergée dans la langue.

Les chansons ! ça marche très bien !

Et puis, il faut leur parler ! Tout simplement ! Nous essayons de nous garder des moments rien qu’avec elle pour favoriser une langue à un moment donné.

Pour le Français, il y a les associations FLAM. Il y a beaucoup de structures qui soutiennent la langue française.

Et quand rien ne nous relie particulièrement à une langue, comme nous avec l’Anglais par exemple ?

Une baby-sitter de langue maternelle. C’est le top ! Cela favorise l’échange parce que l’enfant est obligé de parler dans cette langue !

Notes

Retrouvez Coralie sur instagram et aussi sur son blog Bored with borders. D’ailleurs vous y retrouverez un article complet sur le multilinguisme chez l’enfant.

♥♥♥ Emilie & co ♥♥♥

Epinglez cet article sur Pinterest !

↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓

Le plurilinguisme chez l'enfant
podcast : Le plurilinguisme chez l’enfant

8 Comments

  • Jasmine

    Je vous admire beaucoup Coralie pour votre parcours. Je peux comprendre que vous ayez eu quelques appréhensions concernant le plurilinguisme familial, mais je pense que vous vous en sortez très bien.

    • Florianne

      Oh oui, j’ai l’impression aussi qu’elle s’en sort plutôt bien même si cela demande des efforts pour maintenir et développer toutes ces langues chez les enfants.

  • Lidwine

    Merci très chouette épisode
    Avec une grande de 14 ans baignant dans le plurilinguisme dès sa naissance avec pour objectif d’être

    • Florianne

      Lidwine, votre commentaire a été coupé on dirait mais merci beaucoup pour votre écoute et votre message !

  • Lidwine

    Oui je continue alors ici
    Donc ma fille souhaite être hyperloplyglotte et malgré cet enthousiasme actuel ce n’était pas évident au début de faire vivre toutes ses langues et le parcours de votre invitée m’a un peu replongé dans cette étape du développement des langues chez les jeunes enfants.
    Aujourd’hui elle a pris le relais de son apprentissage des langues et c’est vraiement chouette à voir.
    En sachant qu’elle est multi dys, nous avons eu de la chance de ne pas vivre en France avec ce regard pesant pourquoi apprendre d’autres langues si tu ne sais déjà pas en écrire une.
    Finalement ça a été une chance car si l’écrit l’a bloquait elle avait la chance de pouvoir s’entretenir avec des gens d’horizons divers dans les différents pays que nous fréquentions.
    Ici tous les enfants ont au moins les 3 langues officielles, et souvent minimum une de plus selon l’origine des parents.
    A la veille d’un départ pour la Suède c’est sympa de parcourir votre blog.

Laisser un commentaire